Hilaria : vie et /wanderlust/

Wanderlust [ˈvændəˌlʊst] : l'envie (Lust) de flâner, de randonner (wandern), soit l'envie de voyager, de découvrir le monde


credits : Moïsette Loubelo / millenaryart



 Entrée en matière :

"Il faut que ça parle de toi dans tous les cas. Et ils veulent faire genre qu'ils ne vivent pas pour les autres, qu'ils font ça pour eux... Mais en fait ? Est-ce que tu fais ça pour toi, ou est-ce que tu fais ça pour dire que tu fais ça pour toi ?"

Avec une élasticité du langage sans faille, Hilaria s'exprime, dans un beau mélange de genres et de thèmes, et avec énergie et lucidité, sur son monde, ses courbes et les textures de sa pensée, de son imaginaire, sans faire semblant. Entre intuitions sociologiques et expériences prématurées. Émouvant, touchant et vrai.
Portrait. 


credits : Moïsette Loubelo / millenaryart
"J'aime me tromper sur l'intérieur des gens et voir que ce sont des personnes exceptionnelles" 

credits : Moïsette Loubelo / millenaryart


millenaryart : Qui es-tu ?

H : Je m'appelle Hilaria, j'ai 17 ans, donc je suis une 2002. On me dit souvent que je fais plus que mon âge, et je trouve que c'est vrai. 

millenaryart : En quelques mots, c'est qui Hilaria ?

H : C'est qui Hilaria ? C'est une fille... imprévisible ! Il y a des jours où je m'en fous, mais totalement, où la féminité ça ne fait pas partie de moi, j'en ai rien à faire. Même me décrire "féminine", ça me soule. J'ai pas envie de me maquiller, mais même quand je suis pas maquillée, je me trouve féminine... Je suis contradictoire. Je suis quelqu'un de sensible, grave sensible. Je pleure tout le temps... Mais je dirais pas que je suis faible pour autant. Je pense que j'aime beaucoup les gens. Je m'attache très très vite. Et puis je suis quelqu'un qui adore faire rire. Faire rire et prendre soin des gens. 




credits : Moïsette Loubelo / millenaryartcredits : Moïsette Loubelo / millenaryartmillenaryart : Et qu'est-ce que t'aimes dans les gens ? 

H : J'aime les découvrir au fond. Déjà, je déteste avoir tort, mais j'aime avoir tort au premier abord. Quand je vais penser quelque chose d'une personne, et que je la découvre en bien, ça va me faire plaisir, de m'être trompée ! J'aime me tromper sur l'intérieur des gens et voir que ce sont des personnes exceptionnelles en fait. 






credits : Moïsette Loubelo / millenaryartmillenaryart : Est-ce que tu dirais qu'il y a des choses que tu n'as pas encore faites, que tu ne connais pas, et qui t'attireraient, et pourquoi ? 

H : Partir en voyage seule, j'ai envie de savoir ce que ça fait. J'ai envie de voyager pour voir ce qui se passe, j'aimerais trop... Même la culture asiatique, même si je suis pas là à avoir des notifications sur mon téléphone "Ah il se passe ça en Corée, il se passe ça en ceci...".  J'aimerais trop découvrir les cultures.




millenaryart : Et qu'est-ce qui t'attire dans le fait de découvrir d'autres cultures que la tienne ? Et comment tu définirais ta culture à toi, si tu y arrives ?

H : Déjà moi, vu que je suis métisse, je trouve que j'ai deux cultures : une culture africaine, et une culture un peu plus... occidentale si je peux dire. Et le mix de ces deux cultures ça fait ma culture à moi. La culture qui fait que je suis moi. Et chaque culture définit quelqu'un, genre moi j'ai ma culture, toi t'as ta culture... Pour moi, on peut pas avoir la même culture, c'est impossible. La culture c'est aussi ton arbre généalogique...

millenaryart : Okay, donc pour toi la culture, ce n'est pas simplement le fait d'être de tel pays ou tel pays, mais c'est ton identité, tout ce qui construit ton identité ?

H : C'est ça. 




"Je peux pas être d'accord avec quelqu'un. - Même quand la personne a raison ? - Bah elle n'a pas raison, c'est moi qui ai raison. "



credits : Moïsette Loubelo / millenaryart






millenaryart : Est-ce que tu as des passions, des choses que tu aimes faire ? 

H : J'aime bien raconter des histoires. J'aime trop ça. Alors les écrire, me donner des devoirs, j'aime pas, mais spontanément, j'aime ça. Par exemple, tu n'arrives pas à t'endormir, tu me dis un thème, et je te sors une histoire. J'aime débattre avec les gens, ma passion ! Pas les gens qui disent "Non, c'est moi qui ai raison...", mais les vrais débats, j'adore ça. Et, graille, manger, j'adore ça. 


credits : Moïsette Loubelo / millenaryart

millenaryart : Qu'est ce que t'aimes autant dans les débats ?

H : J'aime bien ce délire de confrontation sans forcément d'animosité. C'est une bonne confrontation, parce que je pense que toute relation a besoin de débattre à un moment. Genre si t'es tout le temps d'accord avec une personne, c'est toi en fait. Et puis, tu peux même pas être d'accord avec toi même, donc c'est pas possible ! Moi de toutes les façons, je te le dis, il faut que je cherche la petite bête, il faut qu'un moment il y ait un débat : exposer ses idées, exposer sa manière de voir les choses, et voir la manière de voir les choses de l'autre personne. Et j'adore convaincre les gens. Quand on me dit "Oh t'as raison sur ce point là", c'est une satisfaction purée ! 





millenaryart : Est-ce que tu as déjà reçu des critiques ? Pourquoi et sur quoi ?

H : ... [sifflement]. Des critiques ? À la pelle... Parce que soit disant, les gens me trouvent trop dure, je m'énerve trop facilement et je suis toujours dans l'esprit de contradiction. Je pense que c'est mon plus gros défaut, je peux pas être d'accord avec quelqu'un. 

millenaryart : Même quand la personne a raison ? 

H : Bah elle n'a pas raison, c'est moi qui ai raison. 


credits : Moïsette Loubelo / millenaryart

"Et à Paris, tout le monde se connait. Donc plus tu connais de gens, plus tu es hype." 


credits : Moïsette Loubelo / millenaryart

"Les gens, quand ils me voient dans la rue, c'est 'Tu fais quoi comme études déjà ? T'es en pro hein ?'" 











millenaryart : À part ça ? 

H : Quand j'étais plus petite oui... Tu sais quand tu es une jolie fille, "jolie" avec des grands guillemets, parce que les gens te trouvent 'jolie' soit disant, il y a d'autres personnes qui se disent "Ah ouais ?",  "Elle elle est jolie, mais moi je suis plus belle", "Mais en fait elle est pas aussi jolie qu'elle", "Mais c'est une p**e hein ?!". Et les gens veulent que détruire ton image, et je ne comprends pas pourquoi ils font ça. Les rumeurs, les "Hilaria elle est comme ça parce que c'est une... ". Donc après il y a les amitiés qui se cassent, mais bon à ce stade là c'est pas des amitiés, c'est des fils... Avant ça me touchait grave. Mais avec le temps, ma famille... tout m'a appris, même la "vieillesse", avec des guillemets encore, m'a appris que... /balsave/ ("je m'en fous", ndlr). Est-ce que je vis pour eux ? Non. 




millenaryart : Est-ce que tu estimes que tu vis dans une génération où on vit, encore plus que les autres générations, pour les autres ?

credits : Moïsette Loubelo / millenaryartH : Grave. En gros, les gens ils ne vivent que pour montrer. C'est je prouve, je prouve, je prouve, je prouve. Et je ne dis pas que je fais totalement le contraire, j'essaye de me détacher de cette image au max, et ça se trouve que je suis comme ça. Mais les gens, c'est "je prouve, il faut que je montre, que je fasse ça, Snapchat...je mange au Fouquet's ? il faut que je le montre à tout le monde, oh j'ai vu Marvin des Anges, oh il faut que je le montre à tout le monde, je connais un tel, il faut que je le montre, nouvelles chaussures...". Dans cette société de consommation, il faut montrer ! Que tu as des belles paires, que tu es belle, il faut faire des jolis snaps, que tu connais les derniers sons à la mode, que tu suis l'actualité. Et à Paris, tout le monde se connait. Donc plus tu connais de gens, plus tu es hype. "Ah ouais tu fumes, tu fais de jolies photos sur Insta", "Ah ouais tu vas à la chicha, t'es trop stylée, t'es trop une bolosse"... Il faut que ça parle de toi dans tous les cas. Et ils veulent faire genre qu'ils ne vivent pas pour les autres, qu'ils font ça pour eux... Mais en fait ? Est-ce que tu fais ça pour toi, ou est-ce que tu fais ça pour dire que tu fais ça pour toi ? Et c'est pour ça que je trouve que cette société est contradictoire, même moi je suis contradictoire pour te dire !

millenaryart : Et toi, est-ce qu'il y a des choses que tu fais pour les autres ? 

H : Ouais. De un, si je continue à aller à l'école, c'est pas pour moi. Parce que j'en peux plus. Si j'y vais et que je continue, c'est parce que si je sors de ce lycée là, ça fait joli sur le papier, et moi j'ai envie que ça fasse joli, pour plus tard. C'est aussi pour que ma maman soit fière. Et pour enfin fermer la gueule aux gens. Parce que les gens, quand ils me voient dans la rue, c'est "Tu fais quoi comme études déjà ? T'es en pro hein ?", alors qu'il n'y a pas de honte à être pro. C'est juste que les gens ont toujours un a priori sur moi. Et quand je dis "Non, je suis en générale", c'est "Vas-y, dis moi 2 + 2 ça fait quoi ?".

credits : Moïsette Loubelo / millenaryartcredits : Moïsette Loubelo / millenaryart





"Tu veux être Macron ?- Non, j'ai pas dit 'Je veux être perdue'." 



millenaryart : C'est quoi tes perspectives dans la vie ? 

H : Bon déjà, tu me diras que c'est pas très original, mais c'est réussir. Réussir quoi que je fasse. Que je fasse des paninis sur la plage ou que je sois une grande éditrice, je veux réussir, et que ça me plaise. Que je me lève le matin, et que je sente que je fais ce qu'il me plait, et pas que je vais travailler. Travailler dans ma tête, c'est grave péjoratif. J'ai envie de soit travailler en tant qu'écrivaine et raconter des histoires, soit, et tu vas rigoler, ouvrir une chaîne de clubs, avec chacun un thème différent : plus "manger", plus "détente", plus "croisière".... Ou finalement, travailler dans la politique.

millenaryart : Donc trois thèmes totalement différents. Et si tu devais travailler dans la politique, qu'est ce que tu aimerais faire ?

H : J'ai un rêve de bébé, de gosse mais... je veux diriger un pays moi ! Soit la France, soit la Belgique. Ou agir sur le pays, agir sur l'opinion publique, agir sur les gens. Et arrêter de tout penser en "pauvres et riches", arrêter de parler de "gauche et de droite". Tu viens de nulle part : tant que tu fais des choses pour ton peuple, et pour tout ton peuple, et pas que pour une partie, bah c'est bien. 

millenaryart : Tu veux être Macron ?

H : Non, j'ai pas dit "Je veux être perdue". Et je veux pas être un chef, je veux être un leader. Tu vois Olivia Pope (Scandal, [ndlr]), Annalise Keating (How to get away with murder, [ndlr]) ? Je veux être elles. 

millenaryart : Est-ce que tu as des modèles, des gens qui t'inspirent et auxquels tu t'identifies ? 

H : Non, mais j'ai cette manie : quand je rencontre une personne, et que j'ai un attrait pour elle, j'essaie de m'identifier. 

millenaryart : Est-ce que tu t'es déjà sentie réellement représentée ? 

H : Non, jamais entièrement. Il y a des choses, que certaines personnalités vont dire, que je reconnais comme vraies, comme par exemple Assa Traoré. J'ai lu son livre, et tout ce qu'elle dit, c'est vrai. Je vois ça au quotidien. Bon, je ne suis pas martyrisée par la Police non plus mais les choses je les vois, je les sens. C'est quelque chose de très touchant, mais je ne me sens pas totalement "représentée". Représentée c'est s'identifier totalement, et je ne pense pas que c'est possible. Mais je reste admirative devant tout ce qu'elle fait, son engagement.



"Si tu vis pour les autres, tu ne vis même pas. Tu survis." 




credits : Moïsette Loubelo / millenaryartcredits : Moïsette Loubelo / millenaryartcredits : Moïsette Loubelo / millenaryart



credits : Moïsette Loubelo / millenaryart
millenaryart : Et si tu avais un mot à passer au monde ?

H : Vivez. Vivez. Il y a des gens qui montrent plus qu'ils ne vivent, d'autres qui ne vivent carrément pas parce qu'ils vivent pour les autres. Vis ta vie. Comme on disait à une certaine époque "Vis ta vie, f**k les avis". Et même si dans certains pays, dans certains États, c'est dur de vivre comme on a envie, dis toi qu'à part quand tu tues les gens, et que tu atteins à la vie des autres, ce que tu veux faire, c'est jamais si mal. Vis pour toi, mange pour toi, lave toi pour toi. Vis. Avec les guerres, avec la Terre qui va bientôt /caner/ (mourir, [ndlr]), t'es obligé de vivre. Si tu vis pour les autres, tu ne vis même pas. Tu survis.


Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

melanos : l'afrique sur la peau

DES FEMMES MUSULMANES ET VOILÉES. PAS DES FEMMES-VOILES

Annabelle, Kim Possible du "lifestyle conscient"